dimanche 29 décembre 2013

Vacances

Pourquoi est-ce si dur d’écrire par moment ? Vais-je arriver même, à écrire quelque chose de bon ? De lisible et léger au moins ? A force de m’efforcer à mon travail, j’ai fini par délaisser certaines de mes activités cérébrales de jeunes hommes, en vrac, le romantisme, la littérature, l’écriture, la chasse (quoique vous en pensiez).... Et finalement, ça évite de tourner en  rond souvent. L’action est salutaire, la capacité aussi à courber l’échine, sans crier qu’on va tous mourir. Maintenant j’ai du temps, et des choses à dire. Cette journée doit au moins être écrite pour le bonheur qu’elle m’a donné. Et démarrer sur une note positive, je trouve ça bien. D’ailleurs c’est en travaux, pour les finitions. Désolé.

Des années que je n’avais pas pris de vacances. Ma femme, dont je suis séparé à accepter de garder notre fille une semaine entière. Et puis mon travail aussi m’a laissé une semaine. Pas plus. En même temps, c’était déjà un défi pour moi. Organiser tout ça, comment m’y prendre, pour quoi, avec quel argent… ?
Je suis parti vers le sud, le plus chaud. Sans trop prévoir donc ! Premier arrêt à Lyon, ma voiture et moi en étions encore à notre premier week-end, alors les pauses furent bienvenues. Pis je ne connaissais pas Lyon. GPS, centre ville. Une place ? Euh, non, toujours pas…, sens interdit, voiture…, je suis où maintenant ?.....Grrrr ! Les grandes villes !
10min plus tard, une place, une misère pour la nuit, cool. Un hôtel ? Un bistrot, pour m’enquérir de l’hôtel. Jamais je ne me ballade, plaisantin, en billebaude. Un hôtel, oui là…ou sinon là-bas. Le deuxième est le bon, 3 étoiles, chambre supérieure, remise sympa, super hôtesse, jeune, dynamique, footeuse pour de vrai.
Vous savez où je peux manger ? Genre une brasserie, avec le match ? Vous voulez le regarder, vous pouvez dans votre chambre, et le resto à côté peut vous y porter votre dîner. Ah oui ? Très bien.
Sympa ce petit bout de ville, les petites rues en retrait des grandes artères, les grandes constructions qui façonnent un labyrinthe de chemins. Début de match, coup de fil de ma fille, de ma femme, de ma mère, presqu’une mi-temps, mes pommes sautées auraient pu finir froides. Je descends griller une clope. Alors y’a combien ? 0-1 ! Non ? Si, si, des piquets ! Ça m’étonne pas…clop…vous êtes fan à ce point ? Oui oui, …Grenier…transfert…nouveau stade…les lyonnaises…bon allez j’y retourne, vous serez encore là après ? Oui, mais pas longtemps, je suis attendue. Votre petit ami ? Oui, enfin non, ce n’est pas ça ! C’est mon dernier bus pour rentrer, à demain peut-être ? Non je serai parti. Bonne vacances… merci, je prends une carte, comme ça je repasserai... Au revoir.
Je ne sais pas vraiment ce que je t’attends de ce genre de rencontres, pas grand-chose finalement maintenant, et puis je trouve que j’ai déjà bien vécu, que les relations comptent plus que le cul, à commencer pour des raisons de confiance, d’hygiène aussi. Parler quelques heures avec une femme, nouer un lien peut-être, c’est déjà de jolis souvenirs, des fois des promesses, de fantasmes au moins. Pas pour ce soir toujours.
Nous sommes mardi, il est 23h00, je fais quoi demain ?
Internet, le wifi est nickel, c’est cool d’avoir acheté ce petit ordi ; bon je regarde quoi ? Des nouvelles sur placelib ? Euh, non, tiens, bizarre. S et S n’ont pas répondu. Et V, tiens encore de la colère sur son blog. D, rien de neuf, N. rien de neuf. Bon allez, c’est les vacances, et si je cherchais vraiment une escort, la Jonquera c’est loin, pis je n’oserai peut-être pas. Lyon, ou Montpellier demain, alors des sites d’ecorts. E.Escort, Lady X, etc… trop cher, putain, laisse tomber. Parle pas français, euh c’est bon je veux aussi une femme qui puisse me raconter des trucs que je comprenne. Pro ou Occasionnelle ?
Des pages et des pages…des notes de tels, de mails. Et celle-là ? Belle jeune femme, latine, exigeante, moins de 30 ans s’abstenir… Jolie brune, même avec le visage flouté elle est belle. Petit ventre discret sous sa robe moulante, chute de rein ahurissante, pas de photos porno. Zut, faut s’inscrire pour la contacter. Ben allons-y. Et un numéro de plus. J’appelle ?
Laisse tomber, deux heures du mat. Ce n’est pas sérieux tout ça. Je vais payer pour une fille ?...Gratte la tête… Bon et alors ? Ben oui, n’empêche, le macho qui s’ignore, esclavagiste, ne s’est encore jamais payé une fille, ça manque à ma panoplie ! Et puis je veux me confronter aussi à cette histoire de sexe et d’argent quand c’est moi qui paie.

9h00, petit déj en terrasse, connexion, je récapitule…laquelle j’appelle : les lyonnaises, pas dispos, plusieurs répondeurs saturés, ou sans message d’accueil… j’ai laissé deux messages en vain à 12h00. Je décolle, direction Avignon peut-être. Ça roule bien, la voiture est géniale, ce n’est pas une conception mentale « la pauvreté », ou « la richesse ». Avignon,  au pied des remparts, parking bien chargé… y’a tout le temps du monde visiblement. Il est 15h00, je mange, une escort me rappelle, certains clients sont tout à côté, ma mère en double appel… grrr !!! Les détails…rendez-est pris pour le lendemain soir. Elle me plaît moyen, sans doute une fille sympa, qui cause pas d’elle. Ensuite, un hôtel, obligation quotidienne de la chasse au gîte.


Je grimpe les remparts, je veux voir de haut… le vent est léger, de nombreuses familles et touristes s’y promènent, je redescends au pied du Palais des Papes, un vieux truc en vieilles pierres, avec une statue en or tout en haut, dont ils ont affublé une des plus hautes salles, d’un bar-restaurant, et qui abrite des expos à la mode toutes les demi-saisons. Cette année, les Papesses, quelques artistes torturées, dont Camille Claudel. A suivre peut-être…
Retour à la voiture, je regarde un SMS de Chloé, sur Paris en ce moment, une fille que je ne lécherais pas vu ses pratiques…mais qui m’avalerait sans broncher ! Comment vous dire les filles qu’on a ce fantasme, tout le temps. Surtout qu’elle promettait  tout en vrac : sodomi, extraball, GFE, soumise, george profende, plan de posisions, avec son français approximatif. Une espèce de pute romaine sortie d’un lupanar peu glorieux. Ouaih bof, pis faut aller à Paris en plus. Laisse tomber !
18h00, tiens c’est A. on dirait ; celle qui m’a le plus tapé dans l’œil. Presque 20 min de conversation, très cool, naturelle, tous les détails d’usage. Rendez-vous demain à Avignon, pour la soirée, voir plus. Je décommande la première, en m’excusant.

Je lui envoie une photo de moi quasi nu, ma main comme cache sexe en fait. Elle a eu la photo en entier... J’ai peur de ne pas lui plaire assez. Il semble qu’elle aime être accompagnée, elle aussi, finalement. Je me sens timide d’un coup, la payer ne me donne aucune autre assurance que d’être bien reçu, c’est le contrat tacite, que trop d’entre nous oublient.
Je coule régulièrement, sans avoir de véritable érection. Je me rase pour m’occuper l’esprit, me met en quête d’un hôtel plus accueillant, même si elle dit ne pas avoir d’exigence. Une belle suite, le genre que je ne m’étais jamais offert avant, finalement c’est accessible à cette saison. Je n’ai pourtant pas vécu reclus, mais j’ai l’impression  de découvrir le monde. L’argent, qu’on le veuille ou non, est souvent le nerf de la guerre, même pour accéder aux femmes d’une manière générale, la question est sociale, et c’est ainsi qu’il met des barrières, surtout aux moins aisés. Ça me fait bizarre de me permettre cette vie, même une semaine.


Un œil sur mes mails, N ne pourra pas me voir a priori, c’est dommage. Je lui écris un peu, lui raconte mes pérégrinations. Mon voyage sera plus court, je ne verrai donc pas l’océan.

Jeudi. Je cours après divers objets usuels qui pourront m’être utiles. Je déménage ensuite dans ma suite. Cool.
Je pense à la soirée, aux heures qui tournent, un peu d’exaltation se fait sentir, doucement. Je me prépare, organise, je n’ai que ça à faire, pour que tout soit prévu. Je me change, pantalon, chaussures vernies, chemise, tout ce que je ne mets quasi jamais… Moi aussi des fois j’ai l’impression de me déguiser. Mais là, ça va, ça fait même sérieux avec mon appareil photo…direction la suite de l’expo au Palais Lambert.
Comme hier, peu d’explications, des œuvres très techniques souvent, bien réalisées, vous verrez donc des clichés (leurs descriptions plus tard) pis ça m’évite les explications de galeriste que personne n’a su me fournir. 


Les visiteurs semblent un train à vapeur, dont les passagers regarde machinalement le paysage, simplement avec lenteur. Les explications sont trop sommaires, personne ne pose de questions, personne ne sait répondre.
Les SMS se font réguliers, dernières précisions obligent. Elle viendra un peu plus tard, j’appelle ma fille, profitant de ce créneau inattendu. Ma mère ensuite, eh oui je ne suis pas qu’un mauvais garçon. Ziiiiinnniiiinn, je suis devant la rue, t’es où ? Je marche à ses indications, ça y est, j’ouvre la portière côté passager, elle m’invite d’un grand sourire. La bise, avec forcément sa troisième qui tombe dans le vide. Chez moi c’est deux. Sourires. Présentations suite, durant le trajet pour retourner à l’hôtel. Enfin dans la chambre ! Je ne suis jamais à l’aise au bras d’une femme que je ne connais pas, à devoir faire des trucs que je ne fais jamais, tout en ayant l’air stoïque. Epuisant.
Je veux lui offrir un verre, mais nous n’arrêtons pas de bavarder, y’aura pas de temps mort ce soir. Elle aime le vin, c’est une qualité qui se perd chez les femmes aujourd’hui, enfin je trouve. Tout est parfait, elle donne l’illusion très bien. Je parle contrat, elle me dit que rien ne presse. Nous buvons, enfin face à face ; je suis déjà séduit. Elle me dit qu’elle me trouve beau, attirant. Pourquoi, lorsque ma femme me le dit, je n’y crois plus ?
Nous sortons, elle est habillée classe, mais pas tape à l’œil, elle aurait pu faire plus osé, mais elle a pris soin de ne pas risquer de me mettre mal à l’aise. Ça ne m’aurait pas dérangé, mais tu es ravissante comme ça. Elle l’était vraiment. Il a bien fallu nos deux cerveaux déjà enivrés par le vin et nos paroles, ainsi qu’un plan de la ville, pour trouver le resto visé. Dîner tranquille à la fraîche, un peu trop pour elle à la fin. Les filles ça a froid.
Nous rentrons pour son confort… Nous reprenons nos verres, elle minaude sans y croire, juste pour le jeu, se rapproche, s’installe, elle me parle cash de sa vie, comme depuis le début, comme moi aussi, du coup ça coule tout seul. Elle me parle de la suite de la soirée, m’embrasse, puis installe les lieux, s’apprête, et revient ; la clim est un peu basse, elle frissonne. Hier je crevais de chaud dans ma chambre hors d’âge. Va falloir me réchauffer dit-elle. Je me prépare aussi, pose l’argent en évidence, pour que ce soit fait, la rejoins. Elle se promène en nuisette noire, sous-vêtements assortis forcément, et des bas pour habiller ses jambes. Sa peau est mate, ses formes tout à fait étourdissantes, ses cheveux noirs et épais dansent autour de son visage, et cadrent à la perfection son regard et son sourire. Elle est vraiment belle, et pourtant elle doute de sa plastique. Une fois couchés, elle guide ma main et mes yeux sur elle, me demande comment je la trouve, me dit qu’elle referait bien ses seins… Et mon ventre… Et mes fesses ? Elles te plaisent mes fesses ? Succube... Je lui défends de toucher à ses seins, embrasse son ventre, je reste sans voix devant son cul, juste parfait... On parle pratiques, MST (toujours super glamour n’est-ce pas !), nos bouchent se joignent. Elle me dit comment la caresser. C’est incroyable comme il faut la serrer pour que son corps réponde, j’ouvrirais ma femme en deux si je la touchais ainsi. Nous parlons toujours, caresses...paroles…baisersàpleinebouche…caresses... Elle me demande ce que j’aime, on se tortille, elle s’offre. Je l’embrasse, la retourne, mes lèvres flânent sur son cul,  je l’empoigne et m’emploie à la manger, elle commence à se caresser, son plaisir vient sans se faire attendre.
Elle m’invite ensuite à la prendre, elle me regarde avec envie (un masque ?), me dit qu’elle veut être dominée ce soir. Me dis pas des choses comme ça ! Pourquoi ? Parce que ça me donne envie de ce que tu m’as interdit. Sourires ! Je place mes mains autour de sa gorge, serre avec plaisir, à la force qu’elle apprécie, un peu, la fait tilter devant moi, mes mains agrippées à sa taille, tchac, tchac, tchactchactchac…regards complices…tchac… Cette fois c’est moi qui ait trop chaud. Nos envies s’apaisent, nous reprenons nos discussions inachevées. Elle précise ses souffrances de petite fille, puis d’ado violée. Et son métier dans tout ça ? Elle a du recul, commence à envisager une thérapie. Elle me parle de son mec, de la nouvelle vie qu’il lui propose, de ses anciens mecs, de ses rencontres, du libertinage. Moi de ma femme, même si j’ai l’impression d’un coup que ça n’a plus le même enjeu, je suis vivant, libre, j’ai déjà tellement… Nous avions déjà tellement. Elle m’encourage à être calme avec ma femme, à lui parler. Elle me dit que je suis un mec bien. Tu ne me connais pas, j’ai des défauts ! Tu sais, les gens bien je les reconnais maintenant. Sourires, baisers, caresses, baumes.
Paraît que venant d’une pute ça ne veut rien dire. Connasse !, que j’ai eu envie de lui cracher à la figure, elle, la concupiscente perpétuelle, qui se souille à l’envie, selon ses propres jugements, pour mieux dénigrer ceux qui osent d’autres aventures. Elle, qui se veut libre de tout, à la dose qu’elle décide et que sa couardise empêche le plus souvent, est prête à tout empêcher aux autres. Mais merde, c’est donc ça son ouverture d’esprit. Et pendant tout ce temps, je n’ai rien vu, j’étais même le rabat-joie.
Déjà, ce n’est pas une pute, mais une escort, elle ne couche que si elle a envie, ce n’est pas une fille facile non plus, surtout si on veut autre chose que son cul, et quand bien même. De toute façon, moi aussi je suis une pute, et alors, c’est tellement plus épanouissant qu’un mauvais job, si on peut choisir. Et ce n’est pas l’argent qui déséquilibre l’échange, c’est l’esprit que certains y mettent. Plus je creuse le sujet, plus la prostitution me semble un droit élémentaire de celui ou celle qui veut en vivre. Je n’ai pas dit autre chose que droit élémentaire. Parce que des fois, ça aide.
Elle ferme les yeux en s’excusant. Elle dort maintenant, moi pas. Je la regarde, son profil est parfait, ciselé.  Je suis bien, je me demande si je pourrai la revoir. L’inviter peut-être !

 Le matin est lourd, elle se réveille avec le sourire mais laisse vite ses angoisses revenir, elle pleure. Je la prends dans mes bras. Je ne pouvais pas faire autrement de toute façon. Pourquoi certains vivent de telles horreurs ? Je voudrais avoir une baguette magique, merde. Ça passe vite, clope, discussion malicieuse, complice, tendre, je profite de sa douche pour la regarder et la toucher encore, nous sommes tous les deux guillerets, je bande sans discontinuer depuis notre lever. Je m’excuse, elle rit. Nous déjeunons, je lui dis que je voudrais la revoir, chez moi, loin d’ici. Elle ne dit pas non. Nous parlons encore, elle aussi semble aimer faire durer ces moments. Premier au revoir.
Nous quittons la chambre ; deux trois clopes devant sa caisse, plein d’au revoir, de baisers doux et de toutes ces choses tellement bonnes.
Pfiuf, je me sens bien, je laisse remonter les premières impressions.
Je regagne ma chambre, prévoit la suite de mon voyage, direction Marseille le soir même.
Marseille c’est monstrueux, 40km de ville le long de la côte. C’est miséreux, à bien des endroits, ils conduisent un peu comme des Parisiens, l’agressivité remplace la mauvaise humeur. D’autres quartiers respirent mieux, mais quand même. Je suis bien dans mes forêts.
Petit tour à Cassis, c’est un autre monde, une bourgade verte, enlacée paisiblement avec la côte. Un mini crachin ne gâche pas mon plaisir, je sens la mer, les vagues ronronnent dans mes oreilles. Arc en ciel.


Repas agréable, avec des cousins, je digère doucement ma nuit.

Le lendemain et après toutes ces émotions, je me dis que je vais aller faire un tour sur les chemins de Pagnol, et trouver une petite maison d’hôtes, en retrait dans les collines. Je vais acheter un peu d’eau, je traîne dans un immense centre commercial, je repense à A, sans cesse.  Le désir est un drôle de ressort. D’abord je bande, puis je pleure, de joie, sans fin, sans vraiment comprendre ce qui m’arrive.
Quelque chose change. Ma colère se tait. J’approche des chemins escarpés, après un petit périple à pied, dans des monte-rues… Pagnol serait triste, ses collines sont mangées par la civilisation. Aubagne se noie dans Marseille.
Je finis par m’inquiéter, si les randonneurs du samedi que je croise n’ont pas de cartes le plus souvent, ils sont tous équipés de chaussures de marche, de survêts courts ou longs, de parka, de bâtons pour certains, de gourdes et de sacs. Bon avec mes baskets de toile fine, aux semelles presque aussi fines, et peu crantées, jean et t-shirt, depuis longtemps pote avec mon canapé, je me dis qu’il faudra penser au demi-tour facilement, surtout que le restaurant au bas ferme à 14h00. Bon allons-y, direction là où tout le monde va, ben oui je n’ai pas de carte ; j’interroge sur le truc à voir dans le coin, celui qui vaut le coup de l’ascension et de la vue : le Garlaban. On me dit 3h00 largement, ça monte, il est 11h30. Je crois que je ne mangerai pas ce midi. J’y vais, ça s’annonce faisable, même dans ma tenue de branleur, un peu long peut-être, mal fléché. Une quinzaine de bornes à flanc de collines, sans vraiment de repères physiques. Certains passages sont pénibles par les cailloux, d’autres parce qu’ils sont très étroits.
Tout en haut, le vent monumental est presque froid, ils ont tous fermé leur parka… je dois faire tâche. La vue est sans limite, mais la ville affleure au loin partout.
De l’autre côté un à-pic, putain c’est haut ! Le calvaire au milieu, et tout autour les collines où Marcel courait petit, où son père réussit le coup du Roi, où son frère demeura quelques années le dernier berger du lieu. Ça me rappelle tellement d’images de ma vie d’enfant, qui disparaît elle aussi.





Je repense à ces larmes de tout à l’heure, elles reviennent tout de suite. Par SMS, une amie m’informe que mon état est soit proche du désespoir profond, soit de la chimère extatique. Réflexion le temps de quelques photos, une clope… Euh eh non ! Et pourquoi ça ne serait pas bon signe ? Je ressens juste ma vie, le monde me semble à nouveau accessible, et puis surtout, je ne manque de rien, je suis presque bien né même. Mes peurs sont brûlées vives par le désir de renouveau, et par tout ce que j’ai déjà accompli. Qu’est-ce qui a changé ? Bon sang, je ne comprends pas, ça ne peut pas être juste à cause d’une nuit avec une fille. Ça ne m’est jamais arrivé... Mais je crois que c’est quand même le déclencheur, pourquoi ?...Je ne comprendrai que deux ou trois jours après, par élimination. Je crois que sa force est communicative, elle emporte tout. Elle affronte le monde sans haine, avec curiosité, et j’étais comme ça avant. Je serai comme ça maintenant. Même si je ne la revois pas, le bien est fait. Nous échangeons un peu par SMS, de manière courtoise, retenue pour moi, parce que tous les mecs lui courent après de toute façon…
Je redescends, de moins en moins sûr de manger, il est déjà 13h15. Bon en même temps, descendre, c’est une affaire de  laisser faire… laisse tes jambes se hâter ! 14h05, bonjour, vous servez encore ? Oui, je pense que ça ira. Petite toilette…je suis tout déculotté tout de même. Je m’installe, je suis bien, la carte est prometteuse, j’ai battu la montagne, enfin, les deux collines. Mon corps ne me fera même pas l’affront des crampes le lendemain, et je ne me suis pas perdu une seule fois. Non la mécanique marche, mes vacances s’enchaînent au poil depuis le début, je suis bon pour le service. Encore une bonne nouvelle.
Œuf poché dans une soupe au foie gras, une entrée légère, soyons frugaux mais jouisseurs. De l’eau, du bon pain, simplement pour accompagner, un délice de la première a la dernière bouchée, avec à chacune d’elles, un soupir intérieur de plénitude culinaire. C’était tellement bien que je ne prends rien d’autre. J’y retournerai un jour dans ce resto. Je fais quoi maintenant ?

Je continue à courir après Pagnol, pour rejoindre le Château de ma Mère, La Busine ; comme le monde de Pagnol, elle est une survivance qui se fait manger, par le béton même (les archi des fois, je ne les comprends pas, j'ai pris en photo le côté authentique et juste rénové). Certaines lettres et photos personnelles, des témoignages plus circonstanciés, des petits textes émouvants, ça bouillonne toujours dans ma tête. Il n’y a qu’un étage dédié à son œuvre, dommage.
D’un coup je voudrais être dans mon canapé pour souffler un peu. Les émotions fortes me fatiguent toujours autant, même cette joie profonde, résurrectionnelle, est envahissante, et trop intense par moment.

Nous voilà samedi soir déjà, aucune chambre d’hôtes dans les collines. Je retourne sur Marseille un peu déçu, demain je reprendrai la route pour rentrer.
Je passerai ma dernière nuit à Orange, le théâtre est à voir, m’a-t’on dit. Je rumine avec entrain et curiosité toute cette semaine, avec plus de calme les mois antérieurs. Vivement la suite.





Adam Forestier

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